/
/
  1. Accueil
  2. Psychanalyse
  3. La castration en psychanalyse
Retour

La castration en psychanalyse

La castration

Le langage s’inscrit en tiers dans la relation mère-enfant et se trouve supporté par ce symbole que Lacan nomme phallus. Au niveau de la castration, l’objet (le phallus) est imaginaire. Lacan le justifie de ceci que, bien entendu, il ne s'agit pas de le couper dans le réel, et ce d'autant moins que cette image phallique est celle qui vaut pour la mère. La menace de castration ne produit son effet qu’à partir du moment où l’enfant admet, après bien des hésitations, que les êtres de sexe féminin n’ont pas de pénis. Il en vient à envisager l’hypothèse que les femmes ont été privées de leur pénis (fantasme de castration).

 

« Aucune castration, de celles dont il s’agit dans l‘incidence d’une névrose, n’est jamais une castration réelle. Elle n’entre en jeu que pour autant qu’elle joue dans le sujet sous la forme d’une action portant sur un objet imaginaire. »[1]

 

Cette hypothèse ne vient pas de nulle part, l’enfant a, antérieurement, fait l’expérience d’autres privations :

  • Privation en premier lieu du corps de la mère lors de la naissance mais aussi séparation d’avec une partie de lui-même, le placenta.
  • Privation ensuite du sein maternel, lors du sevrage, puis de son contenu intestinal lors de l’apprentissage de la propreté.

 

Chacune de ses séparations est liée à une privation de plaisir. Lacan dira privation de jouissance, le terme de jouissance ajoutant à l’idée de plaisir celle d’avoir à sa disposition. A chacun de ces objets, qu’il est convenu d’appeler objets partiels ou objets prégénitaux : le placenta, le sein, les fèces, auxquels Lacan ajoutera le regard et la voix, est attachée une jouissance particulière. Mais la coupure, le manque symbolique qu’implique la castration renvoie à la privation non pas du sujet vis-à-vis de l’objet mais celle de la mère privée de phallus. Cette découverte survient lorsqu’il s’aperçoit que la mère désire et que par conséquent, elle n’a pas ce qu’elle désire.

 

« La castration, que nous cherchons à définir, prend comme base l’appréhension dans le réel de l’absence de pénis chez la femme. »[2]

 

Freud s’oppose à certains de ses élèves qui donnent aux séparations plus haut énumérées la signification d’une castration. C’est seulement l’angoisse de la perte de l’organe viril qui donne rétroactivement, après coup, à celles-ci une valeur castratrice. Lacan suivra le pas de Freud et fera à Françoise Dolto une remarque en ce sens[3]. Dolto défend elle l’idée qu’il y a des castrations symboligènes, qui renvoient à toutes les expériences de séparations. Elle répertorie la série des castrations typiques qui interviennent dans la suite de la diachronie du vécu infantile, notamment : castration ombilicale puis castrations orale, anale, génitale, toutes trouvant leur parachèvement dans ce qui y donne sens récapitulatif et définitif après-coup : la castration œdipienne.

 

Dolto définit ainsi la castration :

« En psychanalyse, le terme signifie une interdiction du désir par rapport à certaines modalités d'obtention de plaisir, interdiction à effet harmonisant et promotionnant, tant du désirant ainsi intégré à la loi qui l’humanise, que du désir auquel cette interdiction ouvre la voie vers de plus grandes jouissances. »[4]

 

Pour Lacan, le fantasme de castration est un aboutissement d’une série de fantasmes typiques décrivant différentes formes de morcellement du corps. Ces fantasmes résultent de l’envie du sein maternel tout autant que de l’angoisse résultant du traumatisme de la prématurité de l’être au début sa vie où il est en situation d’impuissance vitale.

 

Dans la castration, l’objet est imaginaire mais le manque est symbolique. L’enfant constate que les femmes sont privées de pénis et il s’imagine alors qu’il pourrait perdre le sien. L’objet est imaginaire. Le manque est symbolique car il s’inscrit déjà dans un ordre (« il devrait y avoir quelque chose à cette place, il manque quelque chose »). Ce qui manque est désigné par le signifiant phallus.

 

Ainsi, par la frustration, quelque chose ne se réalise pas. Par la privation quelque chose manque. Par la castration, quelque chose pourrait venir à manquer. Cette distinction entre les trois manques est fondamentale puisque concernant la sortie de l’œdipe, en quoi consiste le franchissement qu'est le complexe de castration, elle ne peut être lue qu'avec cette prise en compte de la privation, à quoi introduit la frustration, dans ce double mouvement où l’enfant a à intégrer le désir phallique de la mère en même temps qu’elle est privée de l'organe viril.

 

« Dans l’enseignement des textes de Freud, l’expérience de castration tourne autour de la référence au réel. (…). La notion même de privation, si sensible et visible d’une expérience comme celle-là, implique la symbolisation de l’objet dans le réel. Car dans le réel, rien n’est privé de rien. Tout ce qui est réel se suffit à lui-même. Par définition, le réel est plein. Si nous introduisons dans le réel la notion de privation, c’est pour autant que nous le symbolisons déjà assez, et même tout à fait pleinement. »[5]

 

 

[1] Lacan, J. Le séminaire, livre IV. La relation d’objet, Paris, Ed. du Seuil, 1994, p. 219.

[2] Ibid., p. 218.

[3] Lacan, J. Le séminaire, livre XI. Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, Paris, Ed. Du Seuil, 1973, p. 62.

[4] Dolto, F. Au jeu du désir, Paris, Ed. du Seuil, 1981, p. 301.

[5] Ibid.

Me contacter
Les champs indiqués par un astérisque (*) sont obligatoires
Écrire à Julie Billouin
create Me contacter