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Compte rendu du débat public de Fresnes du 05-10-12

Compte rendu du premier débat public de Fresnes du 5 octobre 2012 :

 

« Quand l’alimentation devient passion… anorexie, boulimie, quelle clinique aujourd’hui ? »

 

 

Le rendez-vous était donné ce dernier vendredi  5 octobre 2012 à Fresnes, par notre collègue Marie-Hélène Viel, pour discuter et écouter des situations à propos d’êtres aux prises avec des troubles alimentaires.

 

Quelle belle expérience et quel beau moment malgré ces situations si délicates, si sensibles, si difficiles à voir et à entendre. Dans la salle beaucoup de personnes ont répondu présent à cette première invitation ! Des professionnels, des étudiants, des parents et des personnes en souffrance, et, bien sûr, des membres du RPH venus soutenir et écouter leurs collègues. Tous attentifs, participatifs, désireux de rendre riche cette tentative de notre école d’amener la psychanalyse au cœur de la Cité et de montrer quel choix elle peut offrir à ceux et celles qui souffrent dans leur existence.

 

Car en effet, la psychanalyse a une place à part. Une place à part parmi les psychothérapies dites brèves où le thérapeute saura que la solution du patient se trouvera en dix séances. Oui, dans ces psychothérapies là le psychothérapeute sait tout apparemment ! Le patient n’a presque pas à faire d’effort… La psychanalyse est à part aussi parmi les thérapeutiques médicamenteuses absolues qui ne font qu’étouffer un peu plus la parole du patient et colmater tel un pansement leur blessure. Colmater n’est pas soigner.

 

La psychanalyse est à part dans le sens où elle donne la possibilité à l’être de se prendre en main, par lui-même, car bien entendu, c’est lui qui pourra savoir ce pourquoi il souffre. Bien sur le psychanalyste l’aidera dans cette traversée qui peut s’avérer mouvementée mais toujours nécessaire et salutaire. Il ne s’agit pas d’appliquer froidement, comme a pu en témoigner une participante, une théorie psychanalytique qui perd de son sens du fait de cette rigidité « toute séance manquée est due ! ». Non, la psychanalyse se manie avec des pincettes et s’ajuste à chaque situation. Au RPH, le silence et la rigidité du psychanalyste ne sont pas de rigueur.

 

Mais revenons au débat ! Les interventions de mes collègues furent d’une richesse incroyable et nous transportèrent dans la clinique avec des patients ou psychanalysants qui souffrent dans leur esprit et dans leur corps. Après une brève mais efficace présentation du RPH par Jean-Baptiste Legouis, ce dernier nous invite d’ores et déjà dans sa clinique et nous présente une vignette clinique cinglante, pointant une chirurgie qui propose illico presto ses services à une patiente qui n’a pu ou pas eu l’occasion de questionner autrement son existence.

 

Grace à Sara Buguet qui modère élégamment ce débat, la parole est ensuite donnée à Aurélie Capobianco qui nous parle d’anorexie. Elle nous décrit incroyablement bien comment le travail analytique peut opérer chez une patiente anorexique, dont les séances aussi sont empreintes de sa restriction. Celles-ci sont peu nombreuses et les mots ne se donnent que petit à petit. Un vrai travail de fourmi pour  notre collègue qui parvient malgré tout à faire naitre le désir de savoir chez cette patiente qui passera alors en psychanalyse. Ici Aurélie Capobianco nous relate son expérience quant au sujet délicat mais au combien nécessaire des séances manquées et de la nécessité de respecter le cadre psychanalytique. Les effets chez sa patiente seront immédiats grâce au corps à corps, tout en douceur, provoqué par cette règle : entrée en psychanalyse et levée du déni des symptômes.

 

C’est à présent à Marie-Hélène Viel, investigatrice de cette belle soirée, de prendre la parole. Son ton et ses talents de conteuse qu’on lui connait bien sont toujours là et c’est ainsi qu’elle nous narre l’histoire d’une patiente boulimique qui « certains jours aimerait se vomir ». Une riche intervention nous est offerte où nous pouvons réaliser à quel point les troubles alimentaires ne concernent pas la nourriture mais ce qui s’y met derrière pour le patient/psychanalysant. Ainsi le pain d’Adeline est bien plus qu’un simple pain et notre travail de clinicien est bien ici d’aider l’être à trouver d’autres voies de jouissance, moins coûteuses que celles des troubles alimentaires.

 

Puis c’est à Julien Faugeras de nous parler de sa clinique, et plus précisément de deux cas cliniques, après une petite pointe d’humour cher à lui quant au fait d’avoir déjà perdu quelques kilos dans les transports depuis Paris ! Anaïs qui est anorexique et « juste maigre » ! Et une histoire de boulimie. S’il est bien souvent question des parents dans ce que disent les patients ou psychanalysants dans leur séance, Julien Faugeras fait bien remarquer qu’il ne s’agit pas là de culpabiliser les parents. Ce qui peut se dire en séance, ce qui nourrit le symptôme, est le fruit de la force de l’imaginaire et du fantasme de ceux qui viennent soigner leur esprit, et non pas une vérité implacable. Notre collègue conclura son intervention sur la parole d’une de ces deux patientes : « la boulimie c’est se remplir d’amour ».

 

Place alors au débat avec la salle. Les questions naissent timidement mais sûrement, toujours polies mais directes. N’y a-t-il que les femmes qui sont concernées ? Qu’est-ce qui distingue une psychothérapie d’une psychanalyse et qu’offre de plus une psychanalyse ? Comment aider les médecins à évoquer ce qui saute aux yeux de tous sauf de la patiente elle-même ? Merci aux présents pour leurs questionnements, leur témoignages, et pour leur présence tout simplement.

 

En conclusion, Fresnes c’était loin mais ça valait largement la peine ! Edith nous brosse en quelques mots une conclusion tout en finesse. Si l’alimentation peut parfois sembler passion, elle nous rappelle les trois passons humaines : l’amour, la haine, l’ignorance. Ne s’agirait-il alors pas plutôt de cela derrière ce que cache ce joli pain ? Car en effet, il s’agit bien d’une saturation symbolique qui conduit à utiliser l’objet réel là où les mots ne peuvent se dire.

 

Merci à tous pour cette belle et riche soirée, merci à Marie-Hélène Viel pour l’avoir pensée et organisée. Et pour ceux qui auraient raté cette occasion, il se dit que cela pourrait se refaire chaque année… alors ne ratez pas le prochain débat !

 

Julie Mortimore

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